Ça y est : le décor est planté pour un glorieux dîner de Noël. La table croule littéralement sous des montagnes de viande, des tas de pommes de terre, des dizaines de salades et des dizaines de bouteilles. La pièce de résistance traditionnelle, cette dinde bio que vous avez payée une fortune pour impressionner les aficionados de la santé, resplendit sur votre table en attendant minuit.
Rien ne peut empêcher que ce soit le meilleur dîner de Noël que vous ayez jamais organisé.
Mais, au point de vue social, une certaine gêne commence à s’installer. Germain, le petit ami jusqu’alors inconnu de votre fille aînée, a bu beaucoup trop de punch et se comporte comme un bouffon. Le visage désapprobateur de tante Marie, que vous avez imprudemment assise à côté de Germain, semble se plisser de plus en plus au fur et à mesure que la nuit avance. Votre fille aînée rit de façon hystérique, pour masquer son malaise alors qu’elle reconsidère ses choix en matière d’hommes. L’oncle Robert raconte des blagues atrocement peu drôles à qui ne veut pas l’écouter, et votre cousin Georges reste muré dans un silence de pierre, refusant de croiser le regard de qui que ce soit.
Savez-vous comment vous comporter avec chacun de vos invités et comment surmonter leurs diverses faiblesses sociales ? Eh bien, il se trouve que je sais une chose ou deux sur les personnalités classiques que vous êtes susceptible de trouver à votre table. Et, une fois que vous les avez repérées, ce n’est qu’une question de temps avant que vous ne détendiez l’atmosphère et que vous ne fassiez de ce dîner un festin de Noël mémorable pour les années à venir.
1. Les introvertis
La plupart des hôtes gémissent intérieurement lorsqu’ils soupçonnent qu’un introverti se cache parmi leurs invités… mais il ne doit pas forcément en être ainsi. Certes, les introvertis sont généralement de nature calme et renfermée, mais cela ne signifie pas pour autant qu’ils doivent être assis à une table séparée, seuls, avec peut-être un bon bouquin à lire pour accompagner leur repas.
Loin de là, en fait. Mais l’introverti doit être approché comme un animal acculé : avec un mélange de prudence et de respect. Ne vous attendez pas à ce qu’il plonge sans hésitation au milieu d’une foule de fêtards et se mette à lancer des blagues à tort et à travers comme l’oncle Robert, mais il appréciera certainement un badinage approfondi en tête-à-tête. Assurez-vous de l’asseoir à côté de n’importe quel autre membre de la tablée aimant disserter sur les folies des hommes ou à côté de quelqu’un qui aime tout simplement ouvrir son cœur. L’oncle Robert n’est probablement pas le candidat idéal.
2. Les introvertis extravertis
Si vous êtes bien placé pour identifier aisément l’introverti classique, timide et peu enclin à se mêler à la foule, vous en accueillerez peut-être un autre type d’introverti moins connu à votre table : l’introverti extraverti. C’est le genre de gars ou de fille qui, pour faire court, est un temps l’âme même de la fête. Il ou elle échange des blagues vaseuses avec l’oncle Robert, crie joyeusement par-dessus la table pour s’adresser aux invités d’honneur, et engloutit la dinde comme si, pour une fois, vous aviez réussi à la garder parfaitement tendre et moelleuse.
Mais il viendra un moment où l’introverti extraverti commencera à se flétrir. Comme tous les introvertis, il se recharge en passant du temps seul. Ainsi, s’il semble décliner rapidement et se lasser de l’oncle Robert, indiquez-lui la direction de votre bibliothèque ou même inventez une excuse pour qu’il puisse s’échapper à temps de la réunion de Noël.
3. Les émotifs
Alors que l’introverti déteste disserter de ses sentiments, la personnalité émotive ne demande que cela. Ces personnes sont les plus susceptibles de prendre au sérieux la magie de Noël, en tentant de la diffuser tout autour d’elles comme si c’était leur seul but dans la vie. Ce sont aussi celles qui chantent « Ô Douce Nuit », qui insistent pour dire les grâces et se tenir la main, et qui s’offusquent de certaines des blagues les plus paillardes de l’oncle Robert.
Les émotifs agissent à table comme des Casques bleus, cherchant à réconforter ceux qui semblent ne pas s’amuser, à intervenir dans toutes les conversations et à amener les autres à y prendre part, et à prendre les autres émotifs sous leur aile. Malheureusement, ce sont aussi les plus susceptibles d’être contrariés par les plus petites chamailleries, et toute tentative ratée de désamorcer une situation n’est généralement pas prise à la légère.
Il convient de leur rappeler gentiment que, si leur présence est très appréciée à la table du dîner de Noël, ce n’est pas à eux de résoudre les problèmes de chacun. Rappelez-leur de s’asseoir, de profiter de la nourriture et de ne pas trop s’investir dans l’instabilité mentale des autres convives.
4. Les argumentateurs
S’il y a bien quelqu’un qui va vous mettre en colère à table, c’est l’argumentateur par excellence, que l’on retrouve dans chaque famille. Les argumentateurs n’aiment rien tant qu’un bon combat mental, quel que soit le sujet, même s’ils n’ont pas participé à la discussion de départ. Les argumentateurs sont les penseurs du groupe. Ils dissèquent les déclarations des autres membres et font très rapidement savoir à quelqu’un qu’il leur manque des faits pour affirmer telle ou telle chose.
De toute évidence, faire asseoir un argumentateur à côté d’un émotif n’est pas une bonne idée. Si vous avez parmi vos proches quelques plaisantins ou des personnes peu susceptibles de s’offenser facilement, veillez à les faire asseoir à côté de l’argumentateur. Sinon, toute personne bien documentée (et susceptible de tenir tête aux autres lors d’une dispute) fera l’affaire.
C’est un jeu délicat que celui auquel vous jouez, mais en connaissant les différentes personnalités présentes autour de votre table, il ne fait aucun doute que ce sera un Noël inoubliable !
Mais lorsque l’on retrouve plusieurs argumentateurs à la table du dîner de Noël, les choses se compliquent un peu. C’est là que vous devez vraiment analyser vos invités et discerner si vos opposants sont du type facile à offenser ou de ceux qui peuvent supporter une ou deux insultes. Les argumentateurs joyeux lurons peuvent être assis les uns à côté des autres. Ils se contenteront de se disputer entre eux à leur guise. En revanche, les argumentateurs facilement offensés doivent être répartis tout autour de la table, de préférence assis à côté de personnes qui peuvent tenir leur rôle dans une dispute, mais qui peuvent aussi rire de tout ce qu’elles perçoivent comme n’étant que de la vexation pure et simple.
-Liivi Hess